Durant les années 50, les Français sont de plus en plus nombreux à découvrir le confort moderne. La consommation d’électricité progresse et commence à remplacer le coke et le charbon, notamment pour les chauffe-eau. Mais son prix demeure élevé.
La mise en service de nouvelles centrales électriques grâce à la construction de barrages, va permettre d’augmenter la production d’électricité et inciter EdF à développer une nouvelle offre commerciale : les tarifs de nuit.
C’est ce que vous allez pouvoir découvrir dans ce quinzième numéro de notre rubrique ”C’est le progrès”.
” La mise en services de nouvelles centrales électriques, réalisée au cours de ces dernières années, permet à l’Électricité de France d’offrir à sa clientèle des conditions avantageuses pour les consommations de nuit.Un nouveau tarif vient d’être mis en vigueur pour les heures creuses. Pour en bénéficier, il suffit de faire une demande à l’Électricité de France, qui se charge de pose du compteur et de la vérification de la ligne.
Le tarif actuel fixe un prix très réduit variant, suivant les localités, de 4 à 6 francs le kilowattheure, compte tenu des taxes locales. Il s’applique, en principe, l’énergie consommée par des appareils comme le chauffe-eau électriques à accumulation, qui fonctionne uniquement pendant la nuit, et sont contrôlés par un interrupteur horaire automatique.
Un abonnement spécial, entraînant une redevance de 1400 à 2800 francs par an, doit être souscrit par ceux qui désirent bénéficier de ce tarif. Cette redevance comprend la location du compteur et de l’interrupteur automatique.
Dans certains cas, et notamment à Paris, les abonnés qui disposent d’un compteur à double ou triple tarif bénéficient du tarif de nuit pour l’ensemble des usages domestiques. La durée des heures creuses étant plus importante, il en résulte une légère augmentation des prix indiqués.
Du fait de ces nouveaux tarifs, le chauffe-eau électriques à accumulation, aux qualités bien connues, devient un moyen économique d’eau chaude. Si l’on compte en général 1 KWh pour 10 litres d’eau à 70°, le litre d’eau, chauffée la nuit, revient donc approximativement à 50 centimes.
Solution à retenir pour les constructions nouvelles et surtout l’aménagement d’installations sanitaires dans les maisons anciennes, car il est facile de dissimuler un chauffe-eau dans un recoin ou, mieux encore, dans un placard.
Le nombre de ces appareils électriques en service est déjà très élevé ; pour beaucoup d’entre eux, il serait intéressant de demander le bénéfice du tarif de nuit.
Deux précautions sont à recommander : le choix d’un appareil de capacité suffisante pour assurer tous les besoins de la journée et l’installation d’une ligne spéciale depuis le compteur d’heures creuses. Les tarifs de nuit intéresseront aussi les femmes d’agriculteurs.
Pour elles, l’eau chaude ne sert pas seulement pour les travaux ménagers et pour les soins d’hygiène : elle est encore largement employée pour le nettoyage du matériel de traite et de la laiterie.
A la porcherie, on pourra ainsi préparer dans un cuiseur électrique, la nourriture des bêtes, ce qui évitera beaucoup de peine et fera des économies.”
Communiqué d’Electricité de France, juin 1952
Marcel Boiteux, directeur commercial de la toute nouvelle entreprise nationale Electricité de France a conçu et mis en oeuvre dès 1949 pour ses clients particuliers une tarification de l’électricité véritablement révolutionnaire. Alors que jusqu’alors, le prix des kilowattheures augmentait avec le niveau de consommation, Marcel Boiteux va appliquer une tarification au coût marginal. Ce prix n’est donc pas un prix moyen, mais correspond au coût de production du dernier kilowattheure produit par les centrales électriques du réseau d’EdF.
Avec cette nouvelle technique de tzrification, Marcel Boiteux, futur Président Directeur général d’EdF, voulait en effet influencer le comportement des consommateurs de façon à ce que les pics de consommation électrique ne grèvent pas trop les coûts de production d’EdF. La mise en place des tarifs de nuit avait ainsi pour objectif, à la fois de convaincre un plus grand nombre de français de s’équiper en chauffe-eau électriques, et de faire en sortes qu’ils les fassent fonctionner la nuit, période pendant laquelle l’électricité des barrages hydroélectriques ne trouvaient pas d’utilisateurs. Rappelons qu’à l’époque, la ”houille blanche” représentait une partie importante de la production nationale ; une part qui a très sensiblement diminuée depuis avec la mise en service des centrales nucléaires.
JL V