Les règles d’urbanisme

Règles aux abords d’un Monument Historique

La proximité d’un monument historique

Pour améliorer la protection des monuments historiques, le législateur a progressivement renforcé les règles d’urbanisme concernant les immeubles situés aux abords de ces monuments.

L’article L.621-30 du Code du patrimoine considère comme faisant partie des abords d’un monument historique, classé ou inscrit, « les immeubles ou ensembles d’immeubles qui forment avec un monument historique un ensemble cohérent ou qui sont susceptibles de contribuer à sa conservation ou à sa mise en valeur ».

Cette servitude d’utilité publique s’impose à tous les propriétaires et occupants et fait peser sur eux des contraintes spécifiques relatives à l’utilisation des sols, aux construction d’immeubles ou aux travaux sur ces immeubles. Si en revanche, seuls les parties intérieures d’un bâtiment sont classés ou inscrites, la servitude relative aux abords d’un monument historique ne s’applique pas.

Cette servitude n’est pas applicable aux immeubles situés aux abords des monuments historiques situés dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable. Par contre, elle prévaut sur celle des sites classés ou inscrits au titre du code de l’environnement.

Initialement, la servitude relative aux abords d’un monument historique portaient sur un périmètre de 500 mètres autour du monument historique et pour les immeubles qui « entrent dans le champ de visibilité » du monument historique.

La loi LCAP de 2016 a clarifié la situation. Désormais, les communes (sous le contrôle de l’État et après enquête publique) peuvent définir le « périmètre délimité des abords » (PDA) de chaque monument historique. « En l’absence de périmètre délimité, la protection au titre des abords s’applique à tout immeuble, bâti ou non bâti, visible du monument historique ou visible en même temps que lui et situé à moins de cinq cents mètres de celui-ci. La protection au titre des abords s’applique à toute partie non protégée au titre des monuments historiques d’un immeuble partiellement protégé ».

Dans un arrêt récent, le Conseil d’État (CE, 5 juin 2020, n° 431994) a précisé cette notion de co-visibilité :  « ne peuvent être délivrés qu’avec l’accord de l’architecte des Bâtiments de France les permis de construire portant sur des immeubles situés, en l’absence de périmètre délimité, à moins de cinq cents mètres d’un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques, s’ils sont visibles à l’œil nu de cet édifice ou en même temps que lui depuis un lieu normalement accessible au public, y compris lorsque ce lieu est situé en dehors du périmètre de cinq cents mètres entourant l’édifice en cause. »

1. Quels travaux nécessitent une Déclaration Préalable ?

Tout propriétaire ou occupant qui envisage des travaux qui pourraient modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment d’un immeuble bâti ou non bâti (cour ou jardin notamment) qui est situé aux abords d’un monument historique sans être lui-même un monument historique, doit obtenir auprès du service de l’urbanisme les autorisations préalables nécessaires. Cette obligation concerne également la démolition ou l’agrandissement d’un bâtiment existant, la création d’une construction nouvelle ainsi que le déboisement.

Tient lieu de cette autorisation préalable « le permis de construire, le permis d’aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable (…) si l’architecte des bâtiments de France a donné son accord » (R. 425-1 code de l’urbanisme).

Avant tout travaux situé aux abords d’un monument historique, il est fortement recommandé de consulter le service de l’urbanisme de votre mairie ou l’unité départementale de l’architecture et du patrimoine de votre département (UDAP) pour vérifier la réglementation en vigueur.

2. Le contenu de la Déclaration Préalable de travaux

Le formulaire Cerfa

Chaque demande doit être présentée en utilisant le formulaire Cerfa n°13404-08 accompagné d’un descriptif détaillé ‘’avant/après’’ des travaux envisagés.

Ce formulaire administratif réglementé doit préciser l’identité et les coordonnées du demandeur, les caractéristiques du terrain et du projet. Les surfaces créées ou supprimées y sont déclarées, notamment pour la mise à jour du calcul des impôts et des taxes.

Des pièces complémentaires sont à prévoir en ce qui concerne la localisation et les caractéristiques de la réalisation.

La présentation de votre projet

Un Plan de situation : il permet de situer le projet au sein du site protégé. Il fait apparaître :

  • – l’adresse exacte des travaux (rue, numéro de rue, commune et code postal)
  • – les parcelles cadastrales
  • – l’échelle et l’orientation
  • – les points de repère communaux (nom des rues, église, etc.)
  • – la localisation du projet (par un signe de couleur ou une croix par exemple)

Vous pouvez générer simplement votre plan de situation sur le site du géoportail de l’urbanisme.

Des photographies : joignez des photographies en couleur des constructions existantes et/ou du terrain :

  • – des photos rapprochées, et si vous souhaitez modifier un élément précis (une porte ou des menuiseries par exemple), prenez soin de prendre une photographie très rapprochée de l’élément en question.
  • – des photos éloignées : plusieurs photos de loin pour faire connaître l’environnement (la rue, le quartier, la vue depuis un point éloigné) et plusieurs photos montrant le terrain sous des angles différents permettent de mieux comprendre l’insertion du projet dans son environnement, notamment par rapport au monument historique.

Des schémas d’insertion ou des photomontages : ces schémas ou ces photos-montage ‘’avant/après’’ doivent permettre aux personnes chargées de l’instruction de votre dossier de mieux visualiser l’insertion de votre projet dans les abords du monuments historique.

Le détail du projet :

  • – ce que vous projetez de faire (matériaux, couleurs, etc.),
  • – l’historique éventuel (autorisations d’urbanisme précédentes),
  • – les devis détaillés des entreprises que vous avez choisies
  • – vos échanges avec la mairie si pertinent.

Le plan de masse. C’est un plan qui présente une vue aérienne du projet (terrain, bâtiments, etc…) et illustre les modifications prévues.

N.B. : Pour éviter de perdre du temps, nous vous recommandons de solliciter un entretien auprès du service de l’urbanisme afin de prendre connaissance des règles d’urbanisme applicables (notamment s’il existe, un ”Périmètre Délimité des Abords”) et vérifier ainsi de la faisabilité de votre projet.
Vous pouvez aussi utilement bénéficiez des conseils gratuits du CAUE de votre département, et dans bien des cas, demander à rencontrer l’architecte des bâtiments de France pour lui expliquer vos intentions.

3. Les délais d’instruction de votre demande

Comment déposer sa Déclaration de travaux

Votre demande doit être adressée, en trois exemplaires minimum, par lettre recommandée avec accusé de réception ou remis en main propre contre décharge. Depuis le 1er janvier 2022, vous pouvez également rédiger votre Déclaration Préalable en ligne ou l’adresser par internet au service de l’urbanisme de votre commune ou, le cas échéant de votre communauté de communes ou d’agglomération.

Les travaux non soumis à permis ou à déclaration préalable au titre du code de l’urbanisme sont soumis à autorisation du préfet de département, au titre du code du patrimoine, rendue après avis de l’ABF. La demande doit être adressée en 3 exemplaires à la mairie.

Délais donnés à l’Administration pour étudier votre dossier

Le délai d’instruction par l’administration est de 2 mois à compter de la date du dépôt de votre demande.

Dans le mois suivant le dépôt de votre déclaration préalable, le service de l’urbanisme peut, par courrier vous notifier un délai supplémentaire de 1 ou 2 mois. Attention, ces notifications de prolongation arrivent dans les boîtes aux lettres généralement très peu de temps avant la fin du délai initial d’un mois !

Si votre dossier est incomplet le service de l’urbanisme peut également vous réclamer des pièces manquantes.

L’instruction par l’Architecte des Bâtiments de France

L’architecte des bâtiments de France (ABF) du département doit veiller à ce que les travaux ne portent pas atteinte au monument historique ou aux abords du monument historique. Il s’assure également du respect de l’intérêt public attaché au patrimoine, à l’architecture, au paysage naturel ou urbain, de la qualité des constructions et de leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant.

L’architecte des bâtiments de France peut demander à visiter lui-même ou un de ses représentants, votre bien afin de mieux se rendre compte de l’impact des travaux que vous envisagez, et vérifier si les travaux que vous envisagez sont ‘’co-visibles’’ avec le monument historique. Si tel est le cas, l’accord de l’architecte des bâtiments de France sera impérativement requis.

L’ABF dispose d’un délai d’instruction d’un mois. Avant le terme de ce délai, il communique sa décision au Préfet.

Affichage public de votre demande

Dans les 15 jours qui suivent le dépôt de votre déclaration préalable, un extrait de votre demande précisant les caractéristiques essentielles du projet est affiché en mairie. Cet affichage est maintenu pendant toute la durée de l’instruction du dossier. Il permet d’informer vos voisins et les associations de protection de l’environnement et de défense du patrimoine afin que ceux-ci puissent, le cas échéant, contester toute ou partie des travaux que vous envisagez.

4. La décision de l’administration

La décision de l’ABF

L’architecte des bâtiments de France peut refuser la demande, l’accepter ou assortir son avis de prescriptions afin que le projet ne porte pas atteinte à la conservation ou à la mise en valeur du monument historique ou des abords. Ces prescriptions sont autant d’obligations que le propriétaire doit respecter. Cette position et ces éventuelles prescriptions s’imposent au maire. Sa décision est donc, soit une acceptation avec ou san prescriptions, soit un refus de votre demande.

La décision du Maire

À défaut d’accord de l’ABF, la demande d’autorisation de travaux ne peut être accordée par le maire.

  • L’arrêté détaillant la décision de l’administration et la position de l’architecte des bâtiments de France, vous sont adressés avant la fin du délai d’instruction par lettre recommandé avec accusé de réception.

Ils sont simultanément rendus public afin que vos voisins et les associations de protection de l’environnement et de défense du patrimoine afin que ceux-ci puissent, le cas échéant, contester toute ou partie des travaux.
Le refus peut être justifié parce que l’architecte des bâtiments de France et/ou le service de l’urbanisme estiment avoir besoin d’informations complémentaires concernant votre projet, ou parce que votre projet doit être modifié.
Un recours contre le refus de l’ABF peut être exercé par les demandeurs ou l’autorité compétente chargée de délivrer l’autorisation de travaux (commune ou intercommunalité généralement) qui peut ensuite demander au préfet de région de revenir sur la décision des ABF après consultation de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture (CRPA).

5. Affichage et validité de l’Autorisation Préalable

L’affichage de l’Autorisation Préalable

Une fois délivrée, l’autorisation de travaux doit être affichée de manière visible de l’extérieur pendant la durée du chantier. Sur un panneau de chantier format 80×120.
Les travaux doivent faire l’objet d’une déclaration d’ouverture de chantier à adresser à la mairie avant le début du chantier. La déclaration d’ouverture de chantier (DOC) est un document signalant le commencement des travaux à la mairie. Il n’y a pas de définition légale de la notion de commencement des travaux.

Les effets de l’affichage

L’affichage fait courir les délais de recours des tiers. Le délai est de deux mois à compter de la date d’affichage. Un constat d’huissier vous permet d’être totalement couvert en cas de contestation. Il est sage d’attendre la fin des délais de recours des tiers avant de commencer tout travaux. Si l’autorisation préalable venait à être annulée, les travaux entrepris devraient alors être repris et la remise en état d’origine décidée.

L’absence d’affichage de l’autorisation préalable sur la parcelle ou un affichage qui ne serait pas visible de la voie publique ne limite pas dans le temps le délai de recours des tiers. 

La validité de l’Autorisation de travaux

Elle est valable 3 ans. Le propriétaire peut toutefois demander deux prolongations d’une année chacune.  

6. La Déclaration d’achèvement et de conformité des travaux

• Une fois les travaux achever, le bénéficiaire de la Déclaration Préalable doit adresser au service de l’urbanisme une Déclaration Attestant l’Achèvement et la Conformité des Travaux (DAACT). Ce faisant, il certifie que les travaux ont été terminés mais aussi qu’ils correspondent au projet présenté dans la demande initiale de déclaration préalable.

• La mairie peut venir vérifier sur place la conformité de votre construction à l’autorisation d’urbanisme.

• La mairie a 5 mois, à partir de la date de réception de la DAACT, pour contester la conformité de travaux effectués dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable. Si votre construction n’est pas conforme, la mairie peut vous mettre en demeure, par courrier en recommandé avec accusé de réception, d’effectuer les travaux nécessaires. Si la régularisation de l’anomalie est impossible, la mairie peut imposer la démolition de la construction.

• Ce document est important car il fait courir les délais de recours qui peuvent être engagés ultérieurement contre le bénéficiaire de la Déclaration Préalable, au pénal pendant les 6 années suivantes, et au civil durant les 10 années suivantes. A défaut de pouvoir produire un tel document, le bénéficiaire de la Déclaration Préalable, ou les nouveaux propriétaires du bien, devront réunir les éléments de preuve permettant de justifier de la date d’achèvement des travaux.