Amérique du Nord

photo Pedro E Guerrero

La Breuer House II à New Canaan, CT

En 1947, Marcel Breuer acheta un terrain à New Canaan dans le Connecticut, pas très loin de New-York. Il dessina sa seconde maison, la Breuer House II, avant de partir pour un long périple en Amérique du Sud, et en confia la réalisation à Eliot Noyes et à Harry Seider. Celle-ci fut achevée en 1948. En 1951, Marcel Breuer et sa famille déménagèrent pour aller s’installer dans sa troisième maison. 

Voici l’excellent article de la revue L’Architecture d’Aujourd’hui paru en 1950 consacré à cette maison connue également sous le nom de Breuer/Robeck House.   

La maison que Breuer a construite pour lui-même est devenue, dès sa réalisation, un ‘’classique’’ de l’architecture moderne. Son volume fort simple se compose d’un grand parallélépipède en charpente de bois posé largement en porte à faux sur un plus petit en parpaing de béton. Seul élément saillant important : la terrasse suspendue par des câbles selon le système de haubans couramment utilisé dans la marine. La sensation de hardiesse dans la conception provient principalement des porte à faux considérables, largement réalisés en ossature bois et dont l’indépendance du soubassement est ainsi fortement accusé. 

Ce parti pris découle logiquement du programme que l’architecte se proposait et qui comprend un volume de services au rez-de-chaussée, beaucoup plus réduit que celui du niveau d’habitation.

Certes, on aurait pu prétendre au même résultat en plaçant la construction sur des pilotis, mais au détriment de l’effet plastique obtenu. La charpente est, du point de vue technique, d’un type qui se rapproche beaucoup de celui de l’habitation traditionnelle américaine.

Les parties en porte à faux sont portées non pas par le plancher en bois également, mais par les deux parois principales calculées et exécutées comme des poutres autoportantes. 

Le raidissage de ce ‘’voile’’ est obtenu par les bardages extérieurs et inférieurs placés en diagonales aux abouts. Des fiches de contreventement supplémentaires sont prévues dans le plan de l’ossature. Le même principe permet de reporter le poids de la terrasse suspendue sur les fondations, et de neutraliser la bascule.

Il est également appliqué au petit porche d’entrée, au panneau de la balustrade supportant les emmarchements, l’ensemble étant en porte à faux et ne touchant pas le sol. Au-dessus de la terrasse, des brise-soleil horizontaux en forme de persiennes sont supportés par les mêmes câbles que ceux assurant la stabilité de la terrasse. 

Sous-sol
1er étage

Breuer a utilisé à l’intérieur des matériaux simples. La finition est en contreplaqué peint. Les plafonds du séjour et de l’entrée en lames de cyprès. La chambre principale est revêtue de contreplaqué de gomme. Les planchers sont en dalles d’asphalte bleu et noir, ou recouverts de nattes haïtiennes.

Dans l’ensemble de l’habitation, on retrouve des couleurs franches combinées avec des panneaux de bois naturel : le mur nord du séjour est en bleu de cobalt soutenu. L’écran bas entre l’aile du repas et l’entrée, et un mur de la chambre principale ont reçu la même teinte. Les autres murs de cette pièce sont blanc, marron, gris moyen. 

La maison a été prévue pour une vie familiale comportant des activités multiples et une large vie sociale. La maitresse de maisons n’a pas de domestique, les invités l’aident à préparer les repas.

Il n’y a de ce fait aucun cloisonnement entre la cuisine et les autres pièces. La cuisine est reliée à la table des repas par un buffet à portes coulissantes. De la cuisine peuvent être surveillées toutes les activité de la maison : jeux des enfant, arrivée des fournisseurs, bien-être des invités. Les chambres ont reçu un aménagement aux fins d’utilisation comme salles de séjour et de travail. Dans la plus importante, un piano, dans les deux autres un bureau à divers usages (dessin, peinture, correspondance), des sièges confortables ont été intégrés. 

Dans la partie basse de l’habitation sont répartis les divers services : chauffage, rangement, seconde salles de bains, chambre d’un jeune garçon. A ce niveau, l’espace libre procure une zone de récréations bruyantes appréciée des enfants et des parents.

La maison (y compris l’équipement intérieur) a pu être achevé pour un prix total d’environ 6.000.000 francs, c’est-à-dire la moitié du prix généralement avancé par les architectes invités à la visiter.

L’Architecture ‘Aujourd’hui, 1950