L’idée d’organiser une exposition en 1951 pour le centenaire de la grande Exposition Universelle de 1851 était déjà l’objet de discussions en 1943.
C’est le gouvernement travailliste de Clement Attlee qui repris l’idée en 1947. Son objectif : remonter le moral de la population, l’aider à reprendre confiance et à se projeter dans un futur beaucoup plus optimiste.
Même si ce projet fut vivement critiqué dès son lancement, le ‘’Festival of Britain’’ de 1951 connu un très vif succès. Il reste pour les Britanniques un des évènements majeurs de l’Après-guerre au Royaume-Uni.
Alors que la grande Exposition Universelle de 1851 était internationale, le ‘’Festival of Britain’’ de 1951 se veut délibérément focalisé sur la prédominance britannique et sa contribution au progrès de la civilisation.
Six ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, la plupart des villes sont encore meurtries par les bombardements, les tickets de rationnement toujours en vigueur, la Livre Sterling a dû être dévaluée de 30% en 1947 et l’Empire commence à prendre son indépendance.
Pour redonner de l’espoir aux Britanniques, l’objectif du gouvernement est de célébrer son peuple, sa langue, sa contribution aux progrès de la civilisation dans tous les domaines des sciences et des techniques, de l’industrie, de l’art et de la culture. Le narratif du ‘’Festival of Britain va donc délibérément mettre en avant une présentation très patriotique voire ‘’hagiographique’’ du pays, choisissant de taire le passé le plus récent, et proposant un avenir radieux grâce aux progrès des sciences et des techniques.
A Londres, le site principal de l’exposition devait se situer à South Bank, sur la rive droite de la Tamise, en face de Westminster. On prévoyait d’édifier des bâtiments à l’architecture futuriste pour l’époque. Une exposition de sculptures avait lieu à Battersea Park à côté du parc d’attraction. Sans oublier ‘’l’exposition vivante d’architecture’’ à Poplar, dans la banlieue Est de la capitale.
Toutes les villes et tous les villages furent invités à s’associer à l’événement. Une exposition ambulante sillonna le pays. Un porte-avion, spécialement aménagé pour l’occasion, mouilla dans tous les grands ports. Partout dans le Royaume, des concerts et des manifestations festives allaient être organisés ….
Malgré une forte opposition, le ‘’Festival of Britain’’ eut bien lieu, de mai à septembre 1951.
Voici ce que la revue L’Architecture d’Aujourd’hui qu’avait écrit à l’époque : « Le London County Council (…) a utilisé le terrain situé entre le County Hall et le pont comme siège du Festival de 1951. Ce site, jadis couvert de bâtiments délabrés, a été complètement rénové, toutes les constructions rasées, sauf une tour (the Shot Tower – n.d.l.r.) où l’on fabriquait autrefois les plombs de fusils et que l’on utilise maintenant comme tour-relai pour la radio ».
« La ‘’South Bank Exhibition’’ n’est pas seulement un symbole ni un témoignage de la reconstruction ; c’est aussi un pas vers un nouvel essor de toute cette partie de la ville. Douze hectares viennent d’être reconquis et rendus aux Londoniens après deux siècles. De plus, 1,6 hectare de terrain a été gagné sur le fleuve grâce à la construction d’une digue ».
« La nouvelle salle de concert du Royal Festival Hall apporte, à ce quartier et au centre de Londres, une vie nouvelle, une source de lumière et d’animation, là où s’étendait, il y a deux ans à peine, des terrains marécageux, avec des ruines dénudées, des bouges et les restes délabrés des entreprises victoriennes ».
Avec leur architecture futuriste, le Skylon et le Dome of Discovery sont tout de suite devenus les figures emblématiques du Festival of Britain.
Le ‘’Palais de la Découverte’’ était à l’époque la plus grande structure circulaire jamais construite. L’édifice conçu par l’architecte Ralph Tubbs représentait une véritable prouesse architecturale.
L’édifice se compose de deux parties principales : d’une part, une couronne circulaire en béton armé de 84 mètres de diamètre portant des galeries d’exposition dont la plus haute se trouve à 11 mètres au-dessus du sol, et d’autre part une toiture auto-portante en alliance léger de 109 mètres de diamètre portée par 48 pylônes en acier tubulaire légèrement inclinés. Ces pylônes sont munis d’une articulation qui permet à la toiture de se dilater librement.
La toiture auto-portante est une structure géodésique formée d’arcs en alliance d’aluminium et de longerons. La poutre circulaire en acier de 104 mètres de diamètre supportant la poussée des arcs est située à 13 mètres au-dessus du sol.
Le cercle de béton et le cercle de la toiture en acier étant tangents, le décalage des centres permet de ménager une avancée de 22 mètres au-dessus de l’entrée principale. La toiture en acier et la couronne circulaire en béton sont raccordés par un tablier conique en métal léger.
Le bâtiment comportait à l’intérieur trois galeries à 3, 6 et 11 mètres du sol et un mur cylindrique, décentré par rapport au dôme, dont la hauteur montait progressivement de 2 à 12 mètres. Ce mur, composé de deux voiles de béton abritaient les escaliers de secours.
Bien qu’étant d’une structure particulièrement complexe (rappelons qu’à l’époque les ordinateurs n’existaient pas encore), le Dome of Discovery a été conçu et monté en 12 mois.
Le Dome de la Découverte abritait un ensemble d’expositions consacrées à la prédominance britannique dans l’exploration et la découverte de l’univers : de la terre, de la mer, des régions polaires, du ciel et l’espace extra-atmosphérique.
On pouvait également y voir une locomotive à vapeur.
Conçu par les architectes Philip Powell et Hidalgo Moya, le Skylon était une structure métallique de 28 tonnes et de 91 mètres de hauteur en forme de cigare, soutenue et suspendue par trois câbles d’acier, semblant flotter à quelques mètres du sol. Ses critiques le comparaient à l’économie britannique de l’époque (‘’ambitieuse mais sans véritables fondements’’). Son nom, le ‘’Skylon’’ découle de la contraction de ‘’Sky’’, de ‘’Pylons’’ et du nom d’un tout nouveau matériau, le nylon. On rapporte que la veille de la visite inaugurale de l’exposition par le Roi George VI, un étudiant escalada le Skylon pour y accrocher l’écharpe de son université.
Bien qu’ayant rencontré de fortes résistances jusqu’à son inauguration, notamment de la part de ceux qui estimaient que cette dépense aurait dû être utilisée pour construire des logements, le ‘’Festival of Britain’’ rencontra un vif succès avec 8, 5 millions de visiteurs. « Une respiration bien méritée après ces dures années de guerre et d’austérité » pour les uns, un effet « tonic to the Nation » pour les autres. La page de la guerre était donc bien tournée. Elle ouvrait la voie aux ‘’Swinging Sixties’’.
Le 25 octobre 1951, un mois après le dernier jour du ‘’Festival of Britain’’, ce sont les Conservateurs qui gagnèrent les élections législatives. Tout juste arrivé au 10 Downing Street, le nouveau Premier ministre Winston Churchill décida de faire démonter au plus vite cette exposition qu’il estimait trop à la gloire des travaillistes. Seul subsista le Royal Festival Hall qui, dès l’origine, avait construit pour être permanent, alors que les autres bâtiments de la South Bank Exhibition semblaient bien avoir été construits pour être démontés à l’issue de l’exposition.
Quoiqu’il en soit, le ‘’Festival of Britain’’ de 1951 reste un des évènements majeurs de l’Après-guerre au Royaume-Uni.
JL V
SOURCES :