La naissance de la Cité Radieuse 4/6
Conçue comme une cité-jardin verticale, l’Unité d’habitation n’a rien à voir avec ce que les Français connaissent jusqu’à présent. Le Corbusier va donc abondement alimenter la presse de l’époque afin d’expliquer les mérites de ce programme.
Nous reproduisons ci-dessous un article qu’il publie dans la revue Urbanisme en 1947 alors que la future Cité Radieuse sort tout juste de terre.
1.800 habitants sur trois hectares de terrain. La population d’un bourg dans 330 logis superposés, 330 appartements grands et petits au milieu d’un parc ou au milieu de terrains de sports et de jardins.Un immeuble de 50 mètres de hauteur, de 135 mètres de longueur et de 21 mètres de largeur, d’un poids de 45.000 tonnes reposant sur 36 pilotis afin de laisser libre la circulation des piétons et éventuellement des automobiles.
Les appartements sont comme de petites maisons familiales indépendantes. Ils sont composés à partir de trois cellules types préfabriquées en série à l’usine et montées par blocs ou panneaux dans une ossature construite sur un terrain artificiel de béton soutenu par des pilotis.
La première cellule comprend l’entrée, la cuisine et la salle commune.La deuxième, la chambre des parents et leur salle de bain. La troisième, la double chambre d’enfants et son installation sanitaire.
Les appartements sont, par ce mode de construction, parfaitement isolés les uns des autres : murs, planchers, plafonds sont entièrement indépendants pour éviter la propagation du bruit d’un appartement à l’autre.
Entre la fonction habitation et certaines fonctions urbaines en relation avec la Santé, la Culture Physique ou Intellectuelle, le Commerce, la Récréation, nous avons montré le lien qui existe, et pensé aux prolongements du logis. C’est, au centre de l’immeuble, un centre commercial où l’on trouve les magasins de ravitaillement, le restaurant cafeteria, le coiffeur, le marchand de couleurs, la blanchisserie, teinturerie, le dépôt de tabac, la poste auxiliaire, le marchand de journaux, la fleuriste du quartier, etc…
C’est aussi le dispensaire pour les consultations et les soins d’urgence, situé au dernier étage avec la garderie d’enfants, qui communique par une rampe avec le toit-jardin, et le gymnase, aussi sur la terrasse, avec sa piste de course à pied et son solarium.
C’est encore le petit hôtel dans un étage intermédiaire, avec ses petites chambres qui remplacent les es chambres d’amis.
Ce sont les buanderies et les dix clubs de jeunesse, deux par étages d’appartements.
Ce sont au pied du bâtiment, dans le parc, les écoles et ateliers de jeunesse, la piscine, les terrains de sport, le garage des autos et des vélos.C’est tout le quartier urbain rassemblé dans la verdure.
Tout est prévu : l’isolation phonique, la propagation de la lumière par la disposition des logis et une étude précise de l’ensoleillement contrôlé suivant les saisons par les loggias-brise-soleil, un aménagement qui simplifie la tâche de la mère de famille. C’est l’un de nos soucis constants de faciliter les travaux de la femme dans son logis : aussi la cuisine est-elle minutieusement étudiée en fonction des gestes et des opérations de la ménagère. Cuisinière électrique, armoire frigorifique, vide-ordures, casiers, table de préparation, etc… sont compris dans la construction des appartements ainsi qu’armoires à vêtements et à linge et les services sanitaires : salle de bains complète pour les parents, douche et lavabos pour les enfants.
Dans l’ensemble même, la mère de famille trouve, à l’étage, des services communs, une buanderie équipée de machines à laver et de séchoirs modernes.
Non. L’Unité d’Habitation à Marseille coûtera 353 millions pour 334 appartements, dont 244 pour des familles de quatre à six personnes ou davantage. Dans ce prix, bien entendu, sont compris les services de ravitaillement, la rue intérieure commerçante avec une dizaine de boutiques, l’hôtel de dix-huit chambres, le dispensaire clinique, la garderie d’enfants avec jardin sur la terrasse, l’équipement de la terrasse et l’équipement complet des appartements : cuisinières électriques, frigorifiques, casiers, penderies, armoires, placards, etc… et tout l’équipements sanitaire.
LE CORBUSIER et l’atelier ATBAT
Revue Urbanisme, numéro 116, 1947
SOURCES :